Vendredi 4 Octobre 2024
Tomas Caetano présentera ses résultats sur l’étude de la régulation de la double activité de dégradation de la RNase J par les modifications épi-transcriptomiques et les structures secondaires.
Résumé :
Les ribonucléases permettant de dégrader et/ou maturer les ARN sont vitales pour l’adaptation de la cellule à des changements environnementaux brusques. Elles possèdent deux modes d’action, un mode endonucléolytique clivant les ARN de manière interne et un mode exonucléolytique les dégradant à partir des extrémités 5’ ou 3’. Les endoribonucléases reflètent un cas remarquable d’évolution convergente car cette activité est portée par la RNase E, la RNase Y et la RNase J, protéines sans aucune similarité de séquences.
Il a aussi été montré qu’en fonction des espèces bactériennes, les substrats et l’activité de ces ribonucléases pouvaient être différents, les rendant parfois essentielles à la survie de la cellule. Mes travaux de thèse portaient sur l’étude du rôle et de la régulation du complexe RNase J chez la bactérie pathogène Staphylococcus aureus. Ce complexe possède une activité duale, endo- et 5’ exoribonucléasique. Cette dernière montre une préférence pour les ARN monophosphorylés en 5’ (5’P) par rapport aux ARN triphosphorylés (5’PPP). Lors de mon travail de thèse, j’ai développé des méthodes statistiques et bio-informatiques adaptées au traitement et à l’analyse de données de séquençage des extrémités 5’ des ARN, données obtenues par une équipe collaboratrice ayant développé des protocoles expérimentaux permettant d’étudier in vivo et à l’échelle du génome l’activité du complexe RNase J. Ces développements ont été regroupés au sein d’une librairie R libre et gratuite. La première question abordée a été l’identification de la ou des protéines NUDIX ribopyrophosphohydrolases (RppH) responsables de la conversion des ARN 5’PPP en 5’P en vue de leur dégradation par le complexe RNase J. Parmi les cinq RppH prédites in silico chez S. aureus, seule l’étude de la plus similaire à celle de B. subtilis a été publiée concluant à son faible impact sur la stabilité des ARN. Mes travaux ont permis de valider le protocole expérimental par rapport à sa capacité à traduire les abondances en proportions des états de phosphorylation de chaque ARN afin de déterminer statistiquement des différences de proportions. Des mutants de délétion pour les cinq RppH candidates (délétions seules ou combinées) ont été obtenus. Aucun des mutants étudiés n’a perdu totalement l’activité RppH. Le système de régulation de ce mécanisme se révèle donc plus complexe qu’attendu chez S. aureus et la difficulté d’obtention de certains mutants de délétion suggère un mécanisme particulier dans cet organisme.
En parallèle, j’ai exploité des données RNA-Seq déjà disponibles obtenues en bloquant la transcription et en mesurant l’abondance des ARN au cours du temps par analyses transcriptomiques, entre une souche S. aureus sauvage et une souche ΔRNase J. En comparant la stabilité des ARN, j’ai montré que 47% des gènes avaient des ARN dont la dégradation dépend de cette enzyme, avec une préférence pour les gènes fortement exprimés.
J’ai également réalisé l’analyse quantitative des intermédiaires de dégradation par rapport aux cadres ouverts de lecture, obtenus grâce à une autre méthode de quantification in vivo des extrémités 5’ des ARN. J’ai mis en évidence, dans la souche sauvage, une distribution périodique de 3 nucléotides correspondant aux codons qui n’est quasiment plus observée dans le mutant ΔRNase J. J’ai ainsi montré que la RNase J peut suivre le dernier ribosome en cours de traduction et qu’elle serait un acteur majeur du mécanisme de dégradation co-traductionnelle. D’autres analyses de ces mêmes données m’ont permis de prédire 125 sites de clivages endoribonucléolytiques de la RNase J. Ces résultats préliminaires pourront servir de point de départ pour des études complémentaires. L’ensemble de mes travaux a donc apporté de nouvelles informations sur l’activité in vivo et le rôle du complexe RNase J chez S. aureus et les méthodes que j’ai développées dédiées à l’analyse des données 5’ RNA-Seq pourront être utilisées dans le cadre d’autres études de ce type.
La soutenance de thèse sera précédée d’un séminaire : Dr Anaïs Le Rhun (INSERM – Université de Bordeaux) : « The bacterial hok/Sok toxin-antitoxin system : regulation & function » .